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Les femmes se tournent vers les arbres fourragers pour engraisser leurs moutons (et leur revenu)

 

Au Mali, les moutons sont associés à des rites de passage traditionnels et à des fêtes religieuses, mais ils sont aussi une source importante de revenus. Toutefois, la disponibilité et le coût des aliments constituent une contrainte majeure en matière de production ovine, surtout en saison sèche.

    Comme le fourrage disponible pour les moutons est soumis à une fluctuation à la fois qualitative et quantitative selon les saisons, il est nécessaire de leur fournir un complément alimentaire, surtout pendant la saison sèche.

    Avant le projet « Agroforesterie et alimentation des moutons au Mali » appuyé par le CRDI, il n’y avait pas de preuve concrète que les feuilles utilisées comme fourrage durant la saison sèche pouvaient nourrir les moutons pendant toute l’année, ou remplacer, d’un point de vue nutritionnel, un aliment pour animaux éprouvé comme les fanes (tiges) d’arachides.

    On ne connaissait pas bien les répercussions financières et nutritionnelles de l’utilisation de fourrage ligneux, et l’on s’interrogeait sur la capacité de production de fourrage, la gestion, la multiplication, ainsi que l’intégration aux systèmes agricoles des différentes espèces d’arbres. On s’interrogeait même sur la présence possible de substances nocives et anti-nutritionnelles dans les feuilles de certaines espèces.

    C’est dans ce contexte que des chercheurs de domaines et d’organismes divers se sont réunis pour étudier les questions d’engraissement des moutons et d’utilisation des arbres comme fourrage. Les chercheurs ont effectué des analyses en laboratoire de la composition chimique de différentes rations, ainsi que des essais d’embouche en stations de recherche et des enquêtes et des expérimentations en milieu rural. Les résultats des travaux visaient surtout les agricultrices, car l’élevage ovin constitue une source de revenus et une méthode de diversification des revenus offrant de nombreuses possibilités pour les femmes.

    Déterminer les trois meilleures espèces d’arbres pour le fourrage

    Selon une enquête réalisée auprès d’agriculteurs de Zan Coulibaly, une communauté rurale du Mali, suivie d’une expérience consistant à nourrir des moutons à une station de recherche, on a déterminé les trois meilleures espèces locales d’arbres comme fourrage pour les moutons, soit Ficus gnaphalocarpa, Pterocarpus erinaceus et Pterocarpus lucens (appelée toro, n’goni et cobi en langue bambara).

    Des groupes de femmes de quatre villages de la même commune ont testé des rations alimentaires incorporant ces fourrages ligneux dans une proportion de 50 % pour déterminer lesquelles offraient les meilleures performances pondérales et en calculer la rentabilité financière potentielle. Le gain de poids moyen quotidien obtenu avec la ration la plus efficace incorporant du fourrage ligneux a été de 143 g comparativement à 122 g avec la ration comprenant les fanes d’arachide. Le fourrage ligneux, que l’on pouvait facilement se procurer dans la région, coûtait 20 CFA/kg (environ 0,05 CAD/kg), tandis que les fanes d’arachide se vendaient à 275 CFA/kg (environ 0,65 CAD/kg) en raison de sa rareté relative. À la fin d’un essai d’embouche de 75 jours, les moutons nourris avec des fourrages ligneux avaient pris 10 kg, soit 15 % de plus que ceux alimentés avec la ration témoin contenant des fanes d’arachide, laquelle coûte près de 14 fois plus cher.

    Ainsi, l’expérimentation d’embouche conduite dans les quatre villages a d’abord permis aux femmes de constater de leurs propres yeux l’effet de l’utilisation de rations comprenant des fourrages ligneux. En voyant les moutons prendre du poids, elles ont pu constater les avantages du fourrage ligneux, ce que les essais en station de recherche et les analyses en laboratoire avaient déjà démontré. Les femmes ont aussi réalisé par la même occasion que l’embouche ovine était à leur portée. Il ne restait plus qu’à faire en sorte que les connaissances et techniques qu’elles avaient acquises soient plus largement diffusées.

    Des techniques améliorées pour l’embouche et l’élevage des moutons

    Bien que les Maliennes élèvent des moutons depuis longtemps, leurs méthodes n’ont pas toujours maximisé les profits. Les chercheurs se sont dit qu’il serait utile de compléter leurs résultats de recherche avec de l’information plus générale sur les bonnes pratiques en élevage et en engraissement ovins. En plus de s’assurer que les moutons ont suffisamment de nourriture pour demeurer en santé et se reproduire toute l’année, il est important qu’ils soient bien traités et qu’ils vivent dans les meilleures conditions hygiéniques et dans le meilleur habitat possible.

    Les chercheurs ont également remarqué que l’engraissement des moutons, qui diffère de l’élevage parce qu’il consiste à engraisser les moutons sur une courte période en vue de les vendre ou de les consommer immédiatement, était plus souvent géré par des hommes. L’engraissement des moutons nécessite une alimentation riche et équilibrée pour un gain de poids maximal en un minimum de temps.

    Ce qui est particulièrement intéressant ici pour les femmes qui élèvent ou engraissent des moutons, c’est que les trois espèces ligneuses susmentionnées peuvent aussi bien servir d’ingrédient principal pour les rations d’embouche que de complément alimentaire pour l’élevage. En ce qui a trait à l’élevage, une expérimentation actuellement en cours dans trois autres villages de la commune permettra d’en faire la démonstration en comparant deux troupeaux de moutons soumis à des régimes différents.

    Des revenus diversifiés et augmentés

    Les données recueillies tout au long de l’année que durera cette expérimentation permettront d’étayer la comparaison en fonction de critères scientifiques objectifs. On s’attend par ailleurs à ce que les participants constatent, en cours d’expérimentation, une augmentation de la productivité des animaux qui bénéficient des compléments alimentaires, ce qui se traduira nécessairement par des revenus supplémentaires et une plus grande sécurité alimentaire. Comme les femmes sont nombreuses à pratiquer l’élevage ovin et sont plus directement touchées par les questions de nutrition au sein des ménages, cela devrait avoir, encore une fois, un impact accru sur elles et leurs enfants.

    d’arbres comme fourrage pour les moutons, soit Ficus gnaphalocarpa, Pterocarpus erinaceus et Pterocarpus lucens (appelée toro, n’goni et cobi en langue bambara).

    Des groupes de femmes de quatre villages de la même commune ont testé des rations alimentaires incorporant ces fourrages ligneux dans une proportion de 50 % pour déterminer lesquelles offraient les meilleures performances pondérales et en calculer la rentabilité financière potentielle. Le gain de poids moyen quotidien obtenu avec la ration la plus efficace incorporant du fourrage ligneux a été de 143 g comparativement à 122 g avec la ration comprenant les fanes d’arachide. Le fourrage ligneux, que l’on pouvait facilement se procurer dans la région, coûtait 20 CFA/kg (environ 0,05 CAD/kg), tandis que les fanes d’arachide se vendaient à 275 CFA/kg (environ 0,65 CAD/kg) en raison de sa rareté relative. À la fin d’un essai d’embouche de 75 jours, les moutons nourris avec des fourrages ligneux avaient pris 10 kg, soit 15 % de plus que ceux alimentés avec la ration témoin contenant des fanes d’arachide, laquelle coûte près de 14 fois plus cher.

    Ainsi, l’expérimentation d’embouche conduite dans les quatre villages a d’abord permis aux femmes de constater de leurs propres yeux l’effet de l’utilisation de rations comprenant des fourrages ligneux. En voyant les moutons prendre du poids, elles ont pu constater les avantages du fourrage ligneux, ce que les essais en station de recherche et les analyses en laboratoire avaient déjà démontré. Les femmes ont aussi réalisé par la même occasion que l’embouche ovine était à leur portée. Il ne restait plus qu’à faire en sorte que les connaissances et techniques qu’elles avaient acquises soient plus largement diffusées.

    Des techniques améliorées pour l’embouche et l’élevage des moutons

    Bien que les Maliennes élèvent des moutons depuis longtemps, leurs méthodes n’ont pas toujours maximisé les profits. Les chercheurs se sont dit qu’il serait utile de compléter leurs résultats de recherche avec de l’information plus générale sur les bonnes pratiques en élevage et en engraissement ovins. En plus de s’assurer que les moutons ont suffisamment de nourriture pour demeurer en santé et se reproduire toute l’année, il est important qu’ils soient bien traités et qu’ils vivent dans les meilleures conditions hygiéniques et dans le meilleur habitat possible.

    Les chercheurs ont également remarqué que l’engraissement des moutons, qui diffère de l’élevage parce qu’il consiste à engraisser les moutons sur une courte période en vue de les vendre ou de les consommer immédiatement, était plus souvent géré par des hommes. L’engraissement des moutons nécessite une alimentation riche et équilibrée pour un gain de poids maximal en un minimum de temps.

    Ce qui est particulièrement intéressant ici pour les femmes qui élèvent ou engraissent des moutons, c’est que les trois espèces ligneuses susmentionnées peuvent aussi bien servir d’ingrédient principal pour les rations d’embouche que de complément alimentaire pour l’élevage. En ce qui a trait à l’élevage, une expérimentation actuellement en cours dans trois autres villages de la commune permettra d’en faire la démonstration en comparant deux troupeaux de moutons soumis à des régimes différents.

    Des revenus diversifiés et augmentés

    Les données recueillies tout au long de l’année que durera cette expérimentation permettront d’étayer la comparaison en fonction de critères scientifiques objectifs. On s’attend par ailleurs à ce que les participants constatent, en cours d’expérimentation, une augmentation de la productivité des animaux qui bénéficient des compléments alimentaires, ce qui se traduira nécessairement par des revenus supplémentaires et une plus grande sécurité alimentaire. Comme les femmes sont nombreuses à pratiquer l’élevage ovin et sont plus directement touchées par les questions de nutrition au sein des ménages, cela devrait avoir, encore une fois, un impact accru sur elles et leurs enfants.

    Déjà, les moutons embouchés vendus à la suite des expérimentations menées dans le village ont donné aux femmes qui y ont participé les moyens nécessaires pour acheter 30 béliers. Fortes des connaissances acquises sur les fourrages ligneux testés précédemment, elles ont décidé d’entreprendre par elles-mêmes une nouvelle opération d’embouche en prévision de la fête de la Tabaski, aussi appelée Eid al-Adha chez les musulmans.

    Nous savions que les moutons consommaient du fourrage ligneux, mais ce que nous ignorions, c’est qu’ils pouvaient prendre autant de poids, en si peu de temps avec les feuilles de certains arbres. 

    Au cours de la Tabaski, chaque chef de famille sacrifie au moins un mouton. À partir des données du dernier recensement général de la population, on peut estimer que plus d’un million de moutons ont été abattus au Mali le jour de la fête en 2013. La demande de béliers à l’occasion de la Tabaski et les revenus qui peuvent en découler sont donc très importants.

    Déploiement en Afrique de l’Ouest

    Les trois espèces d’arbres fourragers locaux qui sont recommandés ne se trouvent pas seulement au Mali, mais aussi ailleurs dans la sous-région, ce qui pourrait permettre un développement à une très grande échelle. L’amélioration des techniques d’élevage ovin et la fourniture de fourrages efficaces pour l’engraissement pourraient avoir des retombées considérables pour une bonne partie de l’Afrique de l’Ouest. Ces projets pourraient viser principalement les femmes, car elles sont plus susceptibles de profiter de l’utilisation d’un fourrage ligneux abordable et disponible localement pour augmenter et diversifier leurs revenus grâce à des pratiques d’engraissement et d’alimentation améliorées.

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    Apprenez-en davantage sur ce projet

    Ce projet est financé dans le cadre du Fonds canadien de recherche sur la sécurité alimentaire internationale, un programme du CRDI entrepris grâce à la contribution financière du gouvernement du Canada fourni par l’entremise du ministère des Affaires mondiales du Canada.

    Faits saillants

    • Avec l’appui de la recherche, les femmes d’une commune rurale du Mali savent maintenant comment utiliser les arbres fourragers pour nourrir leurs moutons. Lorsqu’elles ont remplacé le régime alimentaire de leurs moutons, ceux dont la ration incorporait des feuilles de ligneux fourragers ont gagné autant de poids sinon plus que ceux dont la ration contenait de la fane d’arachide au cours de la même période.
    • Le coût de la collecte de feuilles de certaines espèces d’arbres est 14 fois moins élevé que celui de la récolte de fanes d’arachide en saison sèche.
    • Grâce aux économies réalisées et aux gains de poids obtenus avec ces rations, les femmes ont tiré davantage de revenus de la vente de leurs moutons et ont ainsi pu accroître la sécurité alimentaire de leur famille.